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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

une embrasure évasée, au fond de laquelle se trouvait une meurtrière en forme de croix. Le long de cette embrasure régnait un banc de pierre, sur lequel les anciens habitants de ce cachot venaient sans doute s’asseoir pour chercher un peu d’air et de jour.

Il n’y avait plus trace, comme on peut croire, des scènes hideuses dont cet endroit avait été le théâtre à une époque reculée. De larges crevasses, comme des serpents capricieux, sillonnaient les murailles et les voûtes. Quelques solives légères, des cordes, des poulies, des ferrailles appartenant à l’administration des télégraphes, étaient entassées dans une portion de la salle moins exposée que les autres aux infiltrations de la pluie, et rappelaient seules l’œuvre des hommes vivant au milieu de cette ruine sinistre.

Fanny, élevant sa lanterne, promenait autour d’elle un regard lent et craintif. Elle n’osait ou peut-être ne pouvait parler ; mais évidemment elle ressentait un malaise inexprimable.

Le vicomte, beaucoup moins impressionnable, s’était déjà mis à la recherche du livre des signaux ; il allait et venait avec une vive impatience. Du reste, ces investigations ne furent ni longues ni difficiles. Il n’y avait là que les quatre murs, et quand le petit nombre d’objets appartenant au service télégraphique eurent été déplacés sans résultat, on ne put douter que Raymond Fleuriot n’eût caché ailleurs son précieux manuscrit.

Cransac ressentit un violent désappointement.

— Rien ! dit-il d’une voix sourde en laissant tonber ses bras ; que l’enfer le consume !

— Ne jurez pas, balbutia Fanny avec effort.

Le vicomte continuait de regarder attentivement autour de lui. Tout à coup il demeura immobile ; son œil devint fixe, et il s’écria en étendant la main :

— Que vois-je donc là-bas ?