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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

— Hector, quand voulez-vous que nous partions ?

— Peut-être y aurait-il prudence à nous mettre en route ce soir même ; mais, si vous y tenez, ce sera pour demain matin.

— Il suffit, dit Fanny en se levant avec résolution ; nous avons encore quelques heures devant nous et je veux essayer d’en tirer profit.

En même temps, elle remettait son chapeau et se disposait à sortir.

— Où allez-vous, Fanny ? demanda le vicomte avec éton nement.

— Là-haut ! dit-elle en désignant par un geste énergique la tour du télégraphe ; il est seul en ce moment, il a le manuscrit sans doute… Un peu de patience, Hector ! Je reviendrai bientôt.

Elle voulut sortir ; le vicomte la retint :

— Non, non, Fanny, reprit-il, restez ; cette démarche serait inutile ; je vous défends !…

— Voyons, monsieur, répliqua la prétendue marquise avec impatience, ceci devient une véritable folie. Qu’ai-je à craindre de cet homme ? Je lui imposerai d’un mot, d’un signe de la main. Sa stupide obstination me l’a rendu odieux, et je veux tirer vengeance de tous les ennuis qu’il nous cause.

Le vicomte essaya encore de la retenir, mais elle s’échappa en lui disant avec force :

— Hector, songez que Colman pourra nous donner un million de ce manuscrit… que je vais vous rapporter ?

Deux heures se passèrent. Cransac n’avait cessé de se promener avec impatience dans son cabinet, quand un pas léger et rapide se fit entendre de nouveau sur l’escalier et Fanny reparut. Une expression de consternation était répandue sur son visage. Elle se jeta dans un fauteuil, d’un air accablé, et garda le silence. Hector, de son côté, ne lui