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II

La Bourse.


Le vicomte Hector de Cransac appartenait à une honorable famille, et sa fortune patrimoniale eût pu suffire largement à des besoins modérés. Mais, ayant perdu ses parents de bonne heure, il s’était lancé dans tous les excès auxquels se livrent les jeunes gens riches et trop tôt maîtres d’eux-mêmes. Pendant plusieurs années, Hector avait été un des plus brillants viveurs du boulevard de Gand ; il n’était bruit, dans le monde frivole où il s’agitait, que de ses duels, de ses chevaux, de ses maîtresses. À un pareil train, sa fortune n’avait pu manquer de se fondre promptement. Aussi se trouva-t-il bientôt dans la situation de tant de jeunes fous qui, après avoir jeté un éclat éphémère sur la scène parisienne, s’éclipsent et disparaissent pour toujours.

Cransac eût semblé pourtant digne d’un autre sort. Il ne manquait ni d’instruction ni d’intelligence ; il avait même fait quelques tentatives pour changer cette vie inutile, et avait occupé dans l’administration publique un de ces emplois, plus honorables que lucratifs, qui semblent réservés à des fils de famille. Par malheur, les dissipations, l’entrainement des habitudes l’ayant empêché de remplir avec assez d’assiduité les devoirs de son emploi, il avait dû donner sa démission.