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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

rait debout en le suivant des yeux. Sa contenance trahissait de l’embarras, peut-être un peu de confusion, mais aucune crainte ; il soutint sans faiblir le regard ardent que le vicomte lui lança à son tour.

Quant à Fanny, elle demeurait parfaitement calme ; un sourire languissant se jouait sur ses lèvres roses. Elle se redressa et dit avec aisance :

— Ah ! vous voilà donc, Hector ! Depuis longtemps déjà M. Fleuriot yous attend pour vous parler d’affaires, et je ne savais plus comment lui faire prendre patience.

— Il me semble pourtant, ma chère, que M. Fleuriot ne pouvait trouver plus agréable compagnie, répliqua le vicomte d’une voix un peu altérée. Eh bien, je suis à ses ordres… De quoi s’agit-il ?

Il prit un fauteuil et s’assit ; mais Raymond resta debout.

— Je crois, dit l’employé d’un ton qui n’avait pas son assurance ordinaire, que M. le vicomte est fatigué ou préoccupé en ce moment… Je pourrai revenir un autre jour.

— Pourquoi cela ? demanda le vicomte en recouvrant peu à peu son sang-froid ; je suis très-heureux de voir M. Fleuriot. Je n’ai pas oublié l’immense service qu’il m’a rendu hier à la chasse ; et je comptais aller chez lui ce soir pour lui en exprimer encore une fois ma gratitude.

Malgré la bienveillance affectée de ces paroles, on pouvait sentir un fond d’amertume dans l’accent dont elles étaient accompagnées. Cependant Fleuriot se rassit et ses traits se détendirent.

— Mon cher Hector, reprit tranquillement Fanny, M. Fleuriot vient de m’apprendre une monstrueuse injustice dont il serait victime de la part d’un employé supérieur de son administration. Hier au soir, certaines circonstances, dont il n’avait pas eu le moindre soupçon jusqu’ici, lui ont été révélées et il croit être certain qu’on a indignement abusé de sa confiance. Comme vous jouissez d’un certain