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LA TOUR DU TÉLÉGRAPHE

— Qu’en savez-vous, monsieur mon futur beau-frère ? J’ai pourtant imaginé quelque chose de pareil, et je ne désespère pas de réaliser mon plan ; écoutez-moi : J’ai appris récemment qu’un employé de Paris avait inspiré des soupçons très-sérieux à l’administration ; c’est un nommé Brandin, qu’on accuse d’être cause des erreurs et des singularités suspectes constatées depuis quelque temps dans la transmission des dépêches sur notre ligne. Il est fortement question de le destituer ou du moins de l’envoyer à une station de province ; et alors pourquoi ne demanderais-je pas sa place pour vous ? De cette manière, il n’y aurait plus de séparation et nous vivrions tous sous le même toit.

Fleuriot secoua la tête.

— La place de Brandin serait un avancement, répliqua t-il ; et, malgré votre crédit, monsieur Vincent, vous ne saurez faire que cet avancement me soit accordé.

— Pourquoi cela, Fleuriot ? N’êtes-vous pas l’employé le plus honnête, le plus ponetuel, le plus instruit qu’il y ait de Paris à Bordeaux, comme je l’ai consigné dans plusieurs de mes rapports ?

— Je vous en remercie ; et cependant, je vous le répète, si vous demandez une faveur pour moi, elle vous sera refusée.

— Encore une fois, pour quel motif ? Déjà, en diverses circonstances, vous avez fait allusion à une disgrâce que vous auriez encourue, et j’ai cherché en vain à me rendre compte…

— Vraiment ne savez-vous rien ? demanda Fleuriot en fixant sur l’inspecteur un regard perçant.

— Rien, je vous l’affirme sur l’honneur.

— Vous ignorez, par exemple, que l’on aurait contre moi des préventions invincibles…

— Mais pas le moins du monde, mon cher Fleuriot, et si quelqu’un a prétendu pareille chose, on a indignement menti… En voulez-vous la preuve ? Ces jours-ci, dans les