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les vierges de syracuse

veau imprécises et vagues comme des fantômes ; le chœur des prêtresses devant l’autel ne forma plus qu’une masse blanche, — tel un nuage clair dans un ciel obscur ; et du parvis à la voûte, dans l’atmosphère chargée de parfums, l’âme du peuple répandue ne rencontrait désormais que du mystère. Mais les portes furent ouvertes et du dehors une grande clameur parvint jusqu’à la cella. Tous ceux qui n’avaient pu entrer dans le temple, tous ceux qui, à demi fervents, ne cherchaient de la religion que le côté extérieur, se pressaient maintenant pour voir la procession des prêtresses. « Les Vierges ! Les Vierges ! » voilà le cri qui sortait de toutes les bouches, qui remplissait Ortygie et se perdait dans les flots d’argent de la mer : « Les Vierges ! Les Vierges ! » Si rarement elles se montraient en public, et seulement dans les jours de fêtes solennelles, que c’était sur leur passage un délire, une frénésie. Cependant le respect maintenait en bon ordre toute cette foule qui, sans qu’on fût obligé de l’écarter, formait une double haie de visages derrière laquelle d’autres visages encore s’agitaient, désespérant de rien apercevoir du cortège.

Dorcas était au premier rang. Il avait assisté dans le temple à l’Épiphanie de la Déesse ; mais il n’avait eu de pensée que pour Praxilla, et quand sa voix pure s’était élevée, offrant les parfums, il avait tressailli comme la lyre sous le plectre. Cette voix,