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les vierges de syracuse

moindres surfaces. Alors la majesté de la demeure sacrée fut révélée, pareille à celle d’une forêt enveloppée de brumes et qu’inonde tout à coup la clarté triomphante du soleil. Les colonnes sans base sortaient du parvis comme les arbres du sol ; très larges à leur point de départ, elles s’amincissaient peu à peu jusqu’à leur cime que couronnait un épais turban de grès ; et malgré leur lourdeur extrême elles paraissaient légères et vivantes dans l’irradiation de cette lumière qui les soulevait et semblait pénétrer en elles. Une gravité forte, une noblesse sans apparat, ressortaient de ces profils sublimes, aussi immobiles que l’éternité, mais où l’œil croyait découvrir de souples et divines flexions. Et, se détachant du gris moelleux de la pierre, le long de l’architrave et sur les corniches, c’était la vivacité d’un bleu d’azur, éclatant et profond comme celui du ciel matinal. On eût dit que les dieux eux-mêmes s’étaient plu à bâtir cette demeure pour en faire l’image sensible de ce mystérieux Cosmos, chef-d’œuvre d’harmonie et de beauté, que leur sagesse dès l’aube des temps avait proposé en modèle à l’austère génie dorien.

Mais le peuple de Syracuse ne se préoccupait guère d’admirer, en cette minute solennelle, les splendeurs de l’édifice. Ainsi que tous les rais lumineux d’une étoile convergent au même foyer, tous les regards étaient tournés vers la statue de la