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les vierges de syracuse

tures où dormaient ces mânes qu’un néant plus total encore que celui de la mort, la consommation par le temps de tout ce qui fut l’être organisé, les enveloppait comme un second et impénétrable linceul. Au-dessus, le bruit de la Syracuse vivante, les clameurs du peuple et la course rapide des chars, s’entendait à peine, ainsi que du fond d’une grotte inaccessible au reflux des vagues, s’entend la houle lointaine de la mer. Tout était blanc et immobile comme la clarté lunaire, comme le silence. Indéfiniment, l’œil plongeait dans ce labyrinthe de ruelles et de carrefours, sans rencontrer autre chose que des tombes ou des autels ; et Dorcas pensait que ce serait là un endroit admirable pour voir apparaître Praxilla, le seul endroit digne de son héroïque amour, si jamais le front pur de l’hiérophantide devait lui être révélé.

Il avançait, soulevé par cette extase intérieure, lorsqu’il s’arrêta tout à coup : Orthon l’orfèvre était devant lui ; Orthon, avec son mauvais visage jaune comme l’huile, avec ses épaules étroites et son dos voûté ; et sa voix aiguë troua le silence :

— Enfin, je vous trouve ! Que Zeus vous bénisse ! Voilà trois jours que je retourne à la même heure vous demander au Trésor et que l’on me fait chaque fois la même réponse : Dorcas est à surveiller les travaux de l’hypogée. Bon pour les morts ! mais encore faut-il s’occuper aussi des vivants !