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les vierges de syracuse

machine auprès de ma galère ressemble à une araignée à côté d’un bœuf.

— Avec moins que cela, fit Archimède.

Il sourit et sa bouche merveilleuse, cette bouche qui était la fleur sensible de son esprit, s’épanouit dans les broussailles de sa barbe. Le soleil, qui tombait d’aplomb sur sa tête, en faisait ressortir davantage les défauts puissants, qui se traduisaient en beautés, les rugosités de son crâne chauve et nu, les saillies de ses larges pommettes et l’angle obtus de son nez trop court, pareil à un triangle dont la partie supérieure eût été tronquée. Et de même la négligence de ses vêtements s’étalait dans toute sa plénitude, sous la vive lumière pénétrante et subtile de cette printanière journée. Comme Diogène de Sinope, surnommé le chien du ciel, il méprisait les souillures de la terre ; comme Épicharme, il estimait que c’est la pureté de l’âme qui fait la pureté du corps ; souvent il se laissait traîner de force à l’étuve et frotter par les esclaves, sans abandonner la contemplation de ses problèmes ; et les gamins de Syracuse couraient derrière lui, cortège bizarre où la familiarité se mêlait au respect, et où l’orgueil national de posséder un si grand génie côtoyait la joie ironique de le voir si mal vêtu.

Cette fois encore, en apprenant qu’Archimède