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les vierges de syracuse

Le vieux roi posa la main sur l’épaule de son fils :

— Gélon, dit-il, vous avez toujours été enclin à maintenir votre esprit sur les considérations de l’idéal ; je vous en loue, parce que vous êtes encore à l’âge où l’étude est la plus forte passion. Je vous en louerais davantage encore, si vous n’étiez pas appelé à me succéder bientôt.

En même temps il regardait le jeune homme, et un peu de compassion attendrissait l’éclat de ses prunelles profondes. Gélon, visiblement, inclinait son front vers le tombeau, comme un arbre chétif s’incline vers la terre après n’avoir donné qu’un seul fruit. Alors les regards du vieux roi se portèrent sur le petit Hiéronyme avec une tristesse différente. Robuste et court, l’enfant jouait à sauter sur le sable entre le général Himocrate et son oncle Andranodore. Le sel de la mer mettait un ourlet d’amertume à ses lèvres ; ses yeux lascifs riaient sans qu’on sût pourquoi, non point d’un rire innocent comme celui des enfants de son âge mais d’un rire nerveux et convulsé, qui semait autour de lui l’inquiétude. Il montra la galère et dit tout haut :

— Si j’étais grand-papa, je la ferais remplir de corbeilles d’or et de femmes nues, comme il y en a dans le tableau de Protogène qui est au palais ; et je me mettrais au milieu. On verrait bien alors