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les vierges de syracuse

cet instant, dans l’inquiétude où elle se trouvait, la compagnie même de Gullis lui était précieuse ; pendant qu’elle causait ainsi, les minutes s’écoulaient et Dorcas peut-être allait apparaître au bas du chemin… Elle murmura après un silence :

— Bien sûr que chacun est juge de son propre bonheur : pour moi, je ne voudrais pas changer, dussé-je repousser le séduisant Adonis, qui inspira de l’amour à Perséphoneia elle-même ; et je ne crois pas me tromper en assurant que Dorcas est dans de pareilles dispositions à mon égard.

— On n’est jamais sûr de la fidélité des hommes, dit Gullis avec un mauvais rire de sa bouche tumultueuse.

Certes, il n’y avait rien à reprendre sur la conduite de Dorcas, et elle le savait bien, la vilaine mégère ; mais il lui plaisait de voir rougir et pâlir tour à tour la jeune femme sous ses insinuations perfides. Elle ajouta :

— D’ailleurs il ne sert de rien d’être à leurs trousses, comme le chien d’Ulysse après les amoureux de Pénélope. Peut-on se douter seulement de ce qu’ils font quand ils sont dehors ? Les paroles n’ont pas de couleur ; qu’ils racontent blanc ou noir en rentrant, c’est aussi bon.

— Je ne crois pas que Dorcas m’ait jamais menti, répondit Fanie en changeant de visage.

— Oui-dà ! Vous pensez être seule à le trouver