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les vierges de syracuse

Il marchait vite, les regards fixés devant lui. Un assez long chemin lui restait encore à faire pour regagner la fontaine Aréthuse où sans doute l’attendait toujours le grand-prêtre. Or, à mesure qu’il avançait (était-ce ses forces qui diminuaient ? mais non, ses bras avaient toujours la même vigueur), il croyait sentir peu à peu s’alourdir le corps de Praxilla ; à présent il discernait sous l’enroulement des voiles la moelleuse douceur de la chair ; et contre sa poitrine il sentait s’imprimer, comme un sceau dans la cire brûlante, le front mystique et pur de la Vierge. Sans le vouloir, Dorcas assistait à cette transformation. Il en était sûr, celle qu’il avait retirée des eaux n’était plus rigide et glacée comme tout à l’heure. Et la pensée qu’elle était vivante peut-être, qu’elle revenait doucement à la vie, là, dans ses bras, contre son cœur, le jeta dans un tel paroxysme d’émotion qu’il fut bien près de défaillir ; et ses yeux n’osaient même plus se poser sur elle, dans le vague effroi d’apercevoir à travers l’étoffe de lin la clarté mouvante de deux prunelles…