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les vierges de syracuse

mise sur tout le rivage. Une soif de rapine et de lucre s’était emparée des soldats les plus obscurs. Une soif de sang aussi, l’instinct de la revanche pour toutes les flèches maudites qui des remparts de Syracuse étaient venues s’abattre dans le camp des assiégeants. Maintenant que parlait-on de sagesse ? C’était l’heure de la jouissance et de la vengeance après tant d’humiliations, tant de contraintes endurées ! Appius lui-même ne comprenait rien à la modération de Marcellus. Il voulait pousser jusqu’au bout la gloire des armes romaines et la griserie de la victoire…

Cependant Dinoniède, toujours enfermé dans la citadelle, attendait pour remettre les clefs des portes que le consul lui eût fait connaître ses conditions. Mais les événements ne lui en laissèrent pas le temps. La même bouche qui avait livré à l’ennemi le secret de la tour Galéagra lui avait aussi indiqué par quel moyen pénétrer au cœur même de l’île. Un passage soudainement s’ouvrit, trop étroit pour laisser s’engouffrer tout le flot des envahisseurs. La blanche Ortygie était violée à son tour. Le Temple de la Déesse, le Trésor d’Hiéron, son palais, tout cela tenait comme un bibelot fragile dans la main ouverte du vainqueur. Et maintenant des voix étrangères, les voix des Romains, arrogantes et hautes, profanaient de leur timbre brutal les splendeurs syracusaines. C’était