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dans l’hypogée n’avait transpiré au dehors ; — car il ne pouvait supposer qu’elle cédât au seul désir de le revoir, à l’amour héroïque dont ils avaient fait tous les deux le sacrifice. Hélas ! Dorcas, malgré l’holocauste généreusement accompli, sentait bien que l’âme de cet amour survivait toujours au secret de son être, qu’il n’en avait détruit que la forme sensible, la partie extérieure et humaine. Et il se demandait avec une angoisse mêlée de volupté s’il en était de même pour l’hiérophantide : avait-elle, elle aussi, conservé en sa poitrine, sans parvenir à en abolir l’essence, cette âme invulnérable, cette âme immortelle de leur amour ?

Les circonstances mystérieuses du rendez-vous attisaient encore ses doutes : pourquoi avoir choisi une telle heure, un tel lieu dont la poétique douceur devait forcément attendrir jusqu’à l’émotion physique les caractères les plus solidement trempés ? Oh ! Cette nuit quiète et suave où tout respirait la mollesse et la félicité de vivre ! Cette nuit blanche comme les ailes d’une colombe amoureuse étendue sur le nid douillet de la terre ! Cette nuit sans voiles, et où toutes choses cependant se nimbaient d’une vapeur transparente !… Dorcas déjà sentait sourdre en lui-même une multitude d’aspirations confuses vers le bonheur. Il avait beau être un homme vertueux dont la volonté dominait les passions, il n’en restait pas moins le jeune guerrier ardent, le Dorien au