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les vierges de syracuse

Dorcas était venu, lui aussi, s’humilier devant la divinité. Depuis qu’il ne voyait plus Praxilla, il se sentait désemparé et vacillant, pareil à un navire qui vogue dans une nuit sans étoiles. Cependant il ne songeait pas à enfreindre les volontés de l’hiérophantide ; il ne s’essayait même pas à l’apercevoir de loin, quand elle quittait le temple des Deux-Déesses ou le verger sacré pour aller au bord de l’étang. Bien qu’il ne fût pas superstitieux, il n’avait pu s’empêcher de remarquer cette coïncidence étrange, qu’au lendemain même de leur sacrifice héroïquement consenti Marcellus avait renoncé à poursuivre les opérations du siège. Certes, la gloire en revenait entièrement au génie d’Archimède, à l’extraordinaire présence d’esprit dont il avait maintes fois fait preuve pour repousser toutes les attaques. Mais au-dessus du génie des hommes, au-dessus de la bravoure des soldats et des capitaines, Dorcas savait qu’il existe une puissance conductrice qui règle à son gré les événements et déjoue toutes les prévisions humaines. Et c’était dans cette puissance qu’il se plaisait à se confondre, à s’anéantir sans réserve ; il y goûtait une joie d’apaisement et de repos, la seule qu’il pût éprouver dans l’état de souffrance morale où il se trouvait ; et il remerciait en son cœur Praxilla de lui avoir enseigné la douceur de la prière.

Son adoration achevée, Dorcas voulut à son tour