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les vierges de syracuse

mes lèvres ? Pour voir son image, je me suis penchée au creux de la source. — Dites-moi, dites-moi, dans quel endroit est sa demeure ? Et vous, colombes amoureuses, fidèles oiseaux de Cypris, ouvrez vos ailes et à travers l’espace apportez mon souffle jusqu’à lui… »

Elles passèrent et des deux côtés de la rive, les petits soldats rêveurs oubliaient de tirer leur ligne. Ils oubliaient de tirer leur ligne et suivaient, sur la route blonde, le groupe azuré des jeunes filles. Quand elles eurent disparu, l’un d’eux, mélancoliquement, souleva enfin l’hameçon où pendait une anguille frissonnante.

— Prenez garde qu’elle ne s’échappe ! fit une voix grasse derrière les papyrus.

Gullis était là, dans son attitude familière, les poings sur les hanches et la gorge ballottante sous son peplos. Et elle ricanait, comme toujours, de son rire qui ressemblait au hennissement d’une cavale.

— Ah ! ah ! continua-t-elle. Comme elle frétille avant de se laisser prendre ! On dirait une vierge qui se marie.

— Ce n’est pas comme vous, la mère ! dit irrespectueusement l’un des soldats. Par Héraclès ! je gage que vous ne feriez pas tant de façons…

— Vous vous trompez, dit Gullis en minaudant, je suis une honnête femme ; et la preuve c’est que