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les vierges de syracuse

— Je suis venue vous faire mes adieux, Dorcas !

Il y eut un silence, pendant lequel Orthon supposa la mimique désolée à laquelle devait se livrer l’officier ; et la voix suave de la vierge reprit :

— Ce sacrifice est nécessaire. J’y ai longuement réfléchi avant de m’y décider. Rappelez-vous ce que je vous ai dit un jour : que rien au monde ne saurait m’empêcher de venir à vous, si ce n’est la crainte d’être coupable. Et bien ! c’est cette crainte aujourd’hui qui me dicte ma résolution.

D’un ton où perçait une indicible angoisse, Dorcas répondit :

— Praxilla, est-ce possible ? Est-il possible que vous m’abandonniez en ce moment, à l’heure où j’ai le plus besoin de vos conseils, où votre assistance m’est le plus nécessaire ?

— Il le faut, dit Praxilla. C’est à ce prix seulement, je le sens, que la Déesse consentira à sauver la ville ! Je vous aime trop, Dorcas ; et, bien que cet amour se soit maintenu dans les régions les plus pures de l’idéal, j’ai le devoir de l’immoler à la cause sacrée que nous défendons tous deux. Vous-même, n’avez vous pas des obligations impérieuses qui vous commandent aussi le sacrifice ? Cher frère de mon âme, soyez héroïque comme ces vertueux Doriens du passé dont le sang coule dans nos veines. Brisons nos cœurs, mais assurons le triomphe de notre patrie.