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les vierges de syracuse

Orthon s’était levé ; rapidement, sans même prendre la peine d’essuyer ses mains noircies par le contact du métal, il avait jeté un manteau sur ses épaules, enfoncé sur ses yeux son bonnet de feutre, et il s’était dirigé vers le jardin qui recouvrait de frondaisons épaisses l’ancienne latomie de Denys. Ce jardin, il le connaissait bien. Que de fois il l’avait parcouru, inquiet et haletant, suant malgré lui la honte de cette action mauvaise qui est de surprendre le secret d’autrui, et le plus intime de tous les secrets, un secret d’amour ! Mais aujourd’hui tous ses scrupules étaient dissipés par le brusque départ d’Himocrate ; il sentait l’urgence de s’appuyer sur le seul point fixe qui lui restât et, au milieu de tant de vicissitudes incertaines, de savoir au moins à quoi s’en tenir sur les projets de Dorcas.

Le jardin était désert, et il put facilement se glisser sans être vu jusqu’à la cavité en forme de labyrinthe que l’on appelait communément dans le pays l’Oreille du Tyran. Par un singulier effet d’acoustique tous les bruits de la ville souterraine se trouvaient, grâce à cet orifice, conduits à la surface du sol. Mais Orthon ne se contentait pas de coller, comme Denys, son oreille à l’extrémité supérieure du labyrinthe ; il descendait à plus de soixante mètres dans le roc ; il allait au fond de la cavité même, dans la latomie abandonnée qui for-