tomber dans la mer. Et les habitants apeurés se demandaient comment on pourrait repousser tant de formidables instruments de destruction. Mais un matin ce fut bien autre chose encore. Devant le cap Plemmyrium, sur l’argent liquide des flots, ils virent apparaître une immense lyre dans la forme de celles qu’on appelait sambuces. Elle était supportée par huit galères dont on avait ôté les bancs et qu’on avait jointes ensemble. Les cordes de cette sambuce étaient remplacées par d’étroites échelles, couchées dans toute leur longueur, mais qui, dressées, devaient atteindre au-dessus des murailles de la ville. Et l’immense lyre tout entière semblait ne pas peser davantage sur les flots d’argent que le corps onduleux d’un cygne. Alors l’inquiétude des Syracusains fut à son comble…
Himocrate avait compris le danger. Sans rien dire à personne, il avait quitté Syracuse, laissant la citadelle à la garde de son frère Épicyde. Et il allait secrètement rejoindre l’armée carthaginoise : la force de Carthage seule pouvait s’opposer cette fois encore à la force de Rome ; il reviendrait bientôt, lui aussi, avec un armement formidable, avec des hélépoles que traîneraient des éléphants aux pieds lourds, avec des fantassins aux courtes épées et des cavaliers aux tuniques écarlates, pour défendre Syracuse — ou l’assujettir définitivement à sa domination.