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les vierges de syracuse

nant il s’agissait de le décider à prendre l’initiative de la tactique militaire, à appliquer son extraordinaire génie aux ouvrages de défense de la ville, ainsi que le roi Hiéron le lui avait si souvent demandé. Mais le savant voudrait-il y consentir ? Dorcas en doutait au fond de son cœur. Pendant plusieurs jours il hésita avant de tenter cette démarche suprême. Un soir, cependant, il s’y décida tout à coup ; il courut vers Ortygie.

Malgré l’heure tardive, Archimède travaillait encore. Penché sur un tableau qu’éclairait une lumière débile, il en suivait attentivement les contours qu’il devait avoir tracés récemment lui-même, car l’encre en paraissait humide et fraîche. L’approche de Dorcas ne le fit pas changer d’attitude ; il continua, le front plissé, la lèvre immobile, à examiner les lignes enchevêtrées sous son calame.

Et Dorcas évitait maintenant d’avancer, car il sentait des larmes monter malgré lui à ses paupières ; de voir Archimède comme il le voyait face à face, sous la lumière vacillante de la lampe dont l’huile s’égouttait lentement dans le vase d’argile, il venait d’être saisi de nouveau par la crainte d’avoir caressé une espérance vaine. Ce vieillard usé par toute une vie d’extraordinaires labeurs, tapi au fond de ce palais comme un solitaire au fond de sa retraite, aurait-il la puissance — en admettant qu’il le voulût — d’opposer aux entre-