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les vierges de syracuse

de la colère ou de la joie, de la fureur ou du délire, qui agitait ainsi la multitude.

— Qu’est-ce donc ? dit Praxilla. Jamais encore pareil tumulte n’était arrivé jusqu’à nous. Le peuple se soulèverait-il ?

— Soyez tranquille, fit Dorcas. Il n’y songe guère en ce moment. Ce que nous entendons, c’est l’écho de sa gaieté. C’est la fête du Rire aujourd’hui, et, en ce moment même, on doit couronner la statue de Gélos qui se trouve juste au-dessus de notre tête, dans le jardin des anciennes Latomies.

— Les dieux en soient loués ! fit la prêtresse. Ainsi, Dorcas, vos prières et les miennes n’ont pas été inutiles ; jointes à celles des âmes ferventes qui nous ont précédés, elles ont obtenu à Syracuse un Hiéron bienfaisant au lieu d’un Denys cruel ; et des fleurs croissent en buissons épais là où autrefois se penchait l’oreille du tyran pour entendre les plaintes de ses victimes.

Mais, de nouveau, elle s’arrêta. Et d’un geste instinctif, plus rapide que l’impulsion de son esprit, elle posa sa main sur celle de Dorcas :

— Dorcas, avez-vous entendu ?… Un souffle humain quelque part, près de nous ?…

Une pâleur subite avait envahi le visage de Dorcas. Il s’efforça néanmoins de cacher son émotion :

— Vous vous trompez, Praxilla ; c’est impossible.