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les vierges de syracuse

secrète ferveur ? Un dieu seul eût pu le discerner, encore que dans les entretiens sublimes où ils s’exhortaient l’un l’autre à mieux servir la patrie, l’ardeur de ces deux âmes pareilles montât comme une flamme unique vers le ciel. Et tel était alors l’excès de leur enthousiasme qu’ils oubliaient la singularité du sort qui les faisait se rejoindre ainsi, en dépit des lois, en dépit de toute humaine sagesse. Certes jamais, depuis que se déroulaient dans la cité souterraine les mystères du culte de Perséphone, pareille infraction à l’ordre établi ne s’était produite : jamais un homme, surgissant entre les tombeaux, n’avait troublé par sa présence le recueillement des prêtresses.

Mais Dorcas n’en avait cure. Le plus souvent il arrivait dans l’hypogée longtemps avant que Praxilla dût y venir. C’était tantôt dès la première aube du matin, tantôt quelques heures avant le soir ; mais toujours à l’endroit où ils s’étaient pour la première fois parlé, près de cet autel que l’hiérophantide avait ensanglanté de ses pavots, et devant lequel Dorcas l’avait surprise, étendue et priante, le front sur la pierre.

Ce lieu était le plus désert de ce désert, celui qui ne se trouvait même pas sur le chemin que parcouraient les Vierges. Pourtant Dorcas avait encore une raison de le préférer à tout autre, si austère, si calme et plein de spirituelle magie ! Il lui parais-