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les vierges de syracuse

duite extérieure se modelait sur les règles de l’ascétisme pythagoricien : il observait pendant de longues heures le silence ; il ne mangeait d’aucune chair, ni de rien de ce qui avait eu vie ; il se gardait soigneusement de détruire les moindres insectes, et souvent, dans les chaleurs de l’été, il laissait les moustiques s’attacher à son visage, plutôt que de s’exposer à les blesser en les chassant de la main. Ils étaient nombreux, d’ailleurs, ceux qui dans la Grande-Grèce, en Sicile et particulièrement à Syracuse, conservaient dans leur âme les préceptes que leur avait légués l’austère philosophe ; et hier Empédocle, comme aujourd’hui Archimède, comptaient parmi les anneaux les plus robustes de cette chaîne de vérité qui, de l’Inde à l’Égypte et de l’Orient à l’Occident, maintenait, à travers les multiples formes des superstitions locales, la tradition du plus pur idéalisme.

Au bout d’un instant, le vieux roi reprit :

— Il s’en est fallu de peu, cependant, qu’en ne venant pas vous ayez manqué un spectacle extraordinaire, unique dans les annales du monde, et plus beau, s’il se fût produit, que l’hécatombe des cent cinquante victimes qui ont été immolées sur l’autel.

Le roi avait parlé avec émotion et aussi avec un peu de cette solennité que mettent les vieillards à exprimer leurs pensées intimes. Et Archimède, frappé du son de sa voix, s’était de nouveau arrêté