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les vierges de syracuse

pait son fils dans l’intérieur du palais ; mais sur le seuil il rencontra le grand Archimède, et cela l’inquiéta et le rassura à la fois : le savant aimait Gélon et Gélon l’aimait ; dans ce palais, où chacun était emporté par la vie active, ils étaient les deux seuls êtres occupés de science et de méditation.

— Eh bien, dit le roi, qu’y a-t-il ?

Archimède mit un doigt sur sa bouche.

— Rien de nouveau, fit-il. En ce moment il repose. Il faut respecter cette accalmie que lui envoie la divine sagesse.

Hiéron sans insister rebroussa chemin ; il savait qu’au mal dont souffrait Gélon il n’y avait pas de remède. C’était un affaiblissement de jour en jour plus sensible, un anéantissement successif de toutes les forces physiques, tandis que l’esprit au contraire s’avivait davantage, jetait de nouvelles lueurs, soulagé peu à peu de la matière comme une pierre précieuse de sa gangue.

— Il viendra nous retrouver à son réveil, reprit Archimède ; je lui ai promis d’être là.

Il avait parlé simplement, comme ayant conscience de remplir un devoir, et il trouvait naturel de délaisser pour cela ce qui faisait la joie de sa vie, ce qui la remplissait tout entière.

Dorcas en fut ému et murmura :

— Ainsi vous faites passer les œuvres du cœur avant celles de l’intelligence.