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les vierges de syracuse

celle qu’il nommait sa petite flamme, sa petite lumière, n’eût désormais pour lui que l’affection tranquille d’une épouse…

Quand le roi arriva sur le Timoléontium, la foule était si compacte que Dorcas, inquiet, regrettait en lui-même de n’avoir pas fait mettre sur pied les hoplites. Mais comme par enchantement un passage s’ouvrit devant le vieillard couronné de ses roses d’or, en même temps qu’une acclamation formidable s’élevait de toutes les bouches. On n’attendait plus que lui pour commencer le sacrifice. Le grand-prêtre éponyme était debout sous son dais, le front ceint d’un épais turban de pourpre, et les cent cinquante taureaux avaient été conduits, les yeux bandés, autour de l’autel. Derrière eux les sacrificateurs avaient déjà répandu sur le sol les orges salées. Le bon tyran prit place au milieu de l’estrade qui avait été préparée pour la famille royale, et où dominait son trône ; et, d’un geste de sa main étendue, il remit au grand-prêtre la riche hécatombe, afin qu’elle fût offerte en actions de grâces à Zeus libérateur.

Le sang coulait. Succédant aux acclamations du peuple, la plainte éperdue de surprise des taureaux montait vers le ciel ; d’un bout à l’autre de l’autel immense, leurs flancs convulsés opposaient leur matité sombre à l’éclat étincelant du marbre. Le sang coulait ; en cascades d’abord sur le front