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les vierges de syracuse

qu’Orthon avait ciselée. Elle était épaisse et haute, semblable à une tourelle palissée de roses ; et quelle que fût sa lourdeur, elle semblait ne pas peser sur le front auguste du vieillard. Près de lui, Dorcas avançait respectueusement. Mais le roi le traitait avec familiarité et parfois s’appuyait à son épaule. En passant devant la maison attenante au palais, que l’officier habitait avec sa jeune épouse, on vit luire derrière la fenêtre le visage blanc de Fanie. Elle se tenait blottie là, non point pour contempler la face vénérable d’Hiéron, mais pour apercevoir une fois de plus son cher Dorcas ; et quand il fut tout près d’elle, séparé seulement par l’épaisseur du vitrage, elle lui envoya un baiser de la main, puis elle entr’ouvrit doucement la fenêtre comme pour laisser s’enfuir un oiseau. Le vieux roi, qui avait conservé dans le regard toute l’acuité de la jeunesse, vit l’envolée de ce baiser et sourit. Il dit à l’officier : « Vous avez dû naître sous une heureuse étoile, Dorcas : le plus beau don que les dieux puissent faire à un homme, c’est une femme fidèle ! — En effet, dit Dorcas, et je prie tous les jours la Divinité de me rendre digne d’une telle faveur. » En prononçant ces paroles, il ne put s’empêcher de soupirer. Cette grande tendresse de Fanie, dont longtemps il avait été si heureux, commençait à lui paraître déraisonnable et puérile ; il ne savait comment y répondre et il souhaitait parfois que