Page:Bertheroy - Les Vierges de Syracuse.djvu/130

Cette page a été validée par deux contributeurs.
110
les vierges de syracuse

impressionna si vivement Dorcas qu’il fut sur le point de défaillir. Maintenant toute son attention était attachée à ces mains admirables de la prêtresse. Un à un, de ses doigts légers, elle détachait les pétales, et bientôt ce fut sur l’autel un éparpillement de taches larges et luisantes comme des gouttes de sang. Et la voix claire de Praxilla s’éleva dans la ville funèbre, en fit tressaillir les voûtes :

— Ô Perséphoneia souterraine, terrible Hécate, fille auguste de Déméter, disait l’hiérophantide, je t’appartiens, ô chevelue-de-ténèbres ! Tu marches devant moi, tour à tour lumineuse ou sombre, triste ou gonflée d’espérance comme mon âme. — Je t’appartiens, ô maîtresse de ma destinée ! Prends ma chair, prends mon sang, prends mon désir et ma volonté. Je t’en renouvelle l’offrande sur cet autel, pour la ville de ta gloire, pour la Syracuse aux mille couronnes. Ne permets pas que jamais une main étrangère puisse en profaner la radieuse beauté, ni que l’ombre d’une pensée coupable sépare de ta pensée unique la Vierge consacrée à ton service. »

Elle posa ses lèvres sur l’autel, parmi la jonchée sanglante des pavots et lentement se retourna. Et elle vit Dorcas à genoux, immobile sur le sol, tout blanc lui aussi dans sa tunique de laine. Il lui apparut comme si, de l’un des tombeaux entr’ou-