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les vierges de syracuse

Depuis, cette latomie avait été transformée en un jardin luxuriant orné de statues et de fontaines, où les Syracusains aimaient à se promener aux heures de loisir. Les oiseaux y chantaient, et les fleurs y poussaient en abondance ; et Dorcas se souvint de la parole du poète dorien que « le sang enfante la rose et que les larmes enfantent l’anémone ». Mais ici, dans ce dernier étage de la cité tant de fois reconstruite, rien ne germait ; — et la mort trop vieille n’enfantait plus aucune parcelle de vie. Pourtant sur l’autel qui s’élevait devant ses yeux, Dorcas aperçut un bouquet de pavots…

Il aperçut un bouquet de pavots et, s’étant approché, il vit l’hiérophantide étendue à terre, le front en avant ; sa chlamyde blanche se confondait avec la teinte crayeuse du sol, et son voile de lin par-dessus sa tête prolongeait la ligne sinueuse de son corps. Elle priait ; un souffle régulier soulevait son dos aux épaules évasées comme les deux branches d’une lyre. De temps en temps, un soupir plus profond faisait onduler davantage cette lyre vivante. Dorcas crut qu’elle pleurait. Mais pourquoi l’hiérophantide aurait-elle versé des larmes ? Il s’agenouilla à quelque distance derrière elle et attendit.

Au bout d’un instant, Praxilla se leva et prit le bouquet déposé sur l’autel. Son visage était toujours voilé, mais ses mains étaient nues ; et leur blancheur mêlée à l’incarnat sanglant des corolles