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les vierges de syracuse

Et de même, les élans religieux de Dorcas se résumaient en la seule personne de Praxilla ; il ignorait presque tout du caractère mystérieux de la Déesse ; jamais il n’avait cherché à pénétrer le sens caché de son culte ; aujourd’hui cependant quelque chose d’impérieux, une seconde volonté née en lui, le poussait à en connaître davantage ; et devant chaque autel qu’il rencontrait sur son chemin, il s’arrêtait, interrogeant les pierres muettes. Mais ces autels étaient presque tous nus et sans aucun symbole extérieur ; à peine les distinguait-on d’entre les tombeaux, comme eux incrustés dans la muraille et comme eux froids et insensibles. « J’irai jusqu’au bout de mon pèlerinage, se disait Dorcas ; je visiterai l’un après l’autre tous les endroits consacrés où les prêtresses viennent déposer leurs offrandes ». Ainsi il avançait toujours, mû par cette force irrésistible et secrète que l’amour, à son insu, avait déposée dans son âme ; il se trouvait maintenant dans une partie de l’hypogée où il n’avait jamais pénétré encore ; ce devait être, sous l’Achradine, le lieu correspondant à une carrière abandonnée, que le premier Denys, deux siècles avant, avait organisée en prison. Dorcas se rappelait avoir entendu les récits de ses ancêtres, narrant la cruauté du tyran, qui trouvait un raffinement de plaisir à écouter par un trou disposé dans la pierre les plaintes et les gémissements de ses victimes.