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pareilles. Et il attendait anxieusement le jour où, par un hasard béni, Praxilla viendrait à traverser seule l’hypogée. Que ferait-il alors ? Aurait-il le courage de se montrer à elle, de lui avouer comment et pourquoi il se trouvait là ? En réalité, il n’en savait rien. Mais un immense désir le projetait à l’avance aux pieds de l’hiérophantide. Il était dans cet état de fièvre mentale qui fait paraître réalisables toutes les folies.

Ce jour vint enfin ; c’était le matin, à l’heure où tout dormait encore dans la Syracuse vivante, au-dessus de la cité funèbre. Dorcas, lui, n’avait guère reposé cette nuit-là. Il avait remué dans son esprit des considérations diverses où se confondaient ses ardeurs de patriote et son héroïque amour pour l’hiérophantide ; et dès l’aube il s’était faufilé dans la ville souterraine. Le silence y régnait, encore plus compact, encore plus total que d’habitude ; et là, parmi les mânes des morts anciens, il avait continué de rêver son rêve. Praxilla évoquait à ses yeux tout ce que sa patrie renfermait de noblesse et de vertu ; elle en était la surhumaine protectrice, la jeune Victoire ailée, aux pieds invulnérables et au front sans tache, qui commandait à toutes les autres Victoires dressées sur les seuils des maisons et sous les portiques, et qui, de la pointe extrême d’Ortygie, gardait à la fois l’île, la citadelle et toute la contrée.