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les vierges de syracuse

Romains ? Grâce à la Déesse, le sort de Syracuse n’est pas lié à celui des autres villes.

Il passa ; et celui qui avait parlé d’abord reprit d’un ton assuré :

— Himocrate a déjà gagné à sa cause le gendre du roi, Andranodore, et le jeune Hiéronyme ; il est vrai que Gélon, son fils, parait décidé à maintenir nos libertés. Mais qu’est-ce que Gélon, malade et débile, auprès des deux autres, puissants et forts ? Un homme à pied qui court près d’un char, voilà ce qu’est présentement l’héritier du trône de Syracuse…

Il y eut quelques faibles protestations, mais le venin était jeté et des voix de tous côtés s’élevaient, menaçantes, violentes. Et, comme c’était l’heure où les jeunes gens traversaient la place pour se rendre à la palestre, la foule grossissait à vue d’œil, envahissait l’agora, comme les vagues envahissent le rivage. Le bruit colossal de cette marée humaine faisait retentir les portiques et semblait secouer sur leur piédestal les statues de l’Abondance et de la Concorde qui dominaient l’assistance. Un marchand de légumes, brandissant un lupin énorme, qu’il tenait par la racine comme une lance, clama :

— Qu’il se montre seulement, l’Africain, le traître ; il verra ce que nous, les vrais Syracusains, nous pensons de lui !

Mais, déconcerté, il se tut, ayant aperçu tout à