Page:Bertheroy - Le Colosse de Rhodes.pdf/91

Cette page a été validée par deux contributeurs.
81
le colosse de rhodes

sante, où fermentaient des atomes de vie, montait et échauffait l’air. Alors, ce fut une folie qui passa, une inconcevable ivresse. Les assistants se ruèrent autour de la bête râlante, maintenant affaissée ; ils frottèrent leurs sandales dans le sang qui coulait toujours ; ils plongèrent leurs mains dans les entrailles fumeuses. Des cris rauques, des hoquets, des spasmes… Au fond de la fosse, Likès et ses compagnons râlaient, eux aussi, à demi asphyxiés par la pluie sanglante.

Enfin on emporta la victime ; la nuit venue jetait son ombre sur les mûriers et sur la pierre bleue de la fontaine ; des formes légères aux gestes rapides se glissèrent à la place des dadophores. Et Likès, qui s’était relevé le dernier, sentit une main de femme caresser sa face. La voix de Lyssa retentit à ses oreilles :

— Ô Likès ! Te voilà un homme nouveau ; prends ce manteau, que j’ai apporté pour toi ; essuie tes cheveux avec les pans de mon écharpe. Et viens !

— Où me mènes-tu ? demanda Likès avec émotion.