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CLÉOPÂTRE

tir ? Je t’ai aimée toute petite, quand la reine t’a ramenée de l’oasis d’Augila. Tes cheveux étaient encore courts et tes seins n’étaient pas formés ; mais tu m’apportais les senteurs de mon désert et dans tes yeux je reconnaissais les reflets du soleil de ma terre natale. Je te voyais grandir et mon amour grandissait avec toi. À cause de cela je n’ai pas voulu m’éloigner du palais et quand mes huit années de servitude ont été accomplies, je me suis laissé percer l’oreille droite avec le poinçon, en signe d’esclavage perpétuel. Je veillais sur toi constamment, prêt à te venir en aide au moindre péril qui t’aurait menacée. La nuit, tu m’apparaissais dans mon sommeil ; je rêvais que nous dormions ensemble sous les palmiers de la Syrte, ton front sur mon épaule et mes bras noués à ta ceinture. Je t’aime plus que la lumière de mes yeux, plus que le pain qui nourrit ma bouche. »

Il s’arrêta de parler et se cacha la tête dans ses mains, étonné d’avoir trouvé des paroles et d’avoir osé les prononcer. Et Taïa, qui songeait toujours à Cléopâtre, avait déjà pesé dans son cœur tout le parti qu’elle pourrait tirer de cet aveu.