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CLÉOPÂTRE

de minces sandales. Il était plus de minuit ; la ville peu à peu s’était apaisée : quelques rumeurs lointaines montaient encore par instants des quartiers de plaisir.

Tout à coup d’une rue voisine un tapage éclata, fait de rires prolongés et de chansons. Les voix bruyantes se rapprochaient, devenaient de plus en plus distinctes ; avant que Taïa ait eu le temps de se dissimuler, trois jeunes Grecs débouchèrent devant le Sebasteum ; leurs chlamydes déchirées, souillées du vin odorant de Maréotis, témoignaient d’une orgie à peine consommée ; les pétales des roses effeuillées étaient encore entremêlés aux boucles de leurs chevelures et leurs doigts, chargés de lourds anneaux, portaient de longs sistres d’or dont ils accompagnaient leurs chants. En apercevant la Libyenne, les trois jeunes débauchés avaient interrompu leur marche. Elle-même, par un mouvement machinal, prise de peur, s’était arrêtée et demeurait droite à l’entrée du chantier, le front haut et les mains relevées aux épaules dans une attitude hiératique ; la lune très claire détachait nettement les lignes merveilleuses de son corps.