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CLÉOPÂTRE

transparaissaient comme les plaques d’une ceinture d’or. D’abord il ne bougea pas ; puis peu à peu sa gueule étroite se releva toute frémissante, et parcourut la poitrine lactée de Cléopâtre, cet abîme de voluptés infinies ; puis il s’y blottit tout d’une coulée, engourdi sans doute par la tiédeur de cette chair parfumée, bercé par le soulèvement de ces ondes vivantes.

Mais Cléopâtre voulait des amours plus aiguës, des baisers plus poignants. Ses doigts souples s’allongèrent sur les écailles luisantes de l’urœus. Alors le serpent sacré rouvrit les yeux ; son corps se raidit ; sa tête se gonfla comme tout à l’heure en un disque resplendissant ; il sembla hésiter un instant comme s’il cherchait à quelle place se poserait sa morsure ; puis il s’arrêta et parut subitement transfiguré, revêtu tout entier d’une poussière de soleil : il avait trouvé la rose vivante, la fleur éternelle où s’épanouissait la tentation des siècles ; et sur le bout du sein gauche — que, plus que l’autre, les battements du cœur soulevaient — profondément il enfonça son dard.

Cléopâtre réprima un cri ; ses yeux se voilèrent ; la fraîcheur, que les écailles glissantes