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CLÉOPÂTRE

Cléopâtre : il se sentait assez d’émotion au cœur et assez d’autorité dans les paroles pour la convaincre et l’arracher à cette ignominie dernière.

Mais Cléopâtre refusait obstinément de le voir. Cependant ce matin-là — c’était le quatorzième jour depuis la mort d’Antoine[1] — le Grand Prêtre, introduit par un soldat acheté à prix d’or, parut soudainement devant la reine, au moment où l’Imperator venait de la quitter. Elle avait conservé la pose étudiée, un peu alanguie, qu’elle avait prise pour recevoir le jeune César ; un de ses bras replié en arrière soutenait sa nuque bien arquée ; et la ligne de son corps ondulait tout entière sous la tunique de lin blanc. Aucun collier, aucun joyau ne gênait la souplesse de ses membres ; même elle avait supprimé de son ajustement, en signe de deuil, la large ceinture qu’elle portait d’ordinaire.

Le prêtre s’était arrêté en face d’elle, les bras croisés ; il la contemplait ; et, pour la première fois aussi pleinement, la prédominance du principe mauvais, cette malédiction latente

  1. Voir note justificative no 43, p. 352.