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CLÉOPÂTRE

témoignait. Elle s’était débarrassée de son frère Ptolémée pour garder à elle seule le trône ; elle avait fait tuer Artavasde, le roi d’Arménie, sans compter un grand nombre de disparitions mystérieuses ou de meurtres avérés. Dernièrement encore, après la défaite d’Actium, elle avait donné ordre de mettre à mort plusieurs des principaux habitants d’Alexandrie qui avaient eu l’audace de blâmer ouvertement sa conduite[1]. Elle n’en était donc pas à son coup d’essai et le sang répandu ne la troublait guère. Mais cette fois il s’agissait d’Antoine, qu’elle avait aimé, qu’elle aimait encore ; il lui semblait que tout ce qu’elle avait donné d’elle à son amant crierait et saignerait dans ce sacrifice ; car elle ne pourrait se débarrasser de lui que par la mort ; elle se l’était attaché de telle sorte que, pour briser des liens si étroitement noués, il ne fallait rien moins qu’une catastrophe finale. Cependant elle n’avait pas le courage de considérer en face cette solution et vis-à-vis d’elle-même elle prenait des biais pour y arriver, supposant un malheur qui

  1. Dion Cassius, liv. LI.