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CLÉOPÂTRE

Alors Cléopâtre prit la parole :

« Quelle que soit la force d’un homme, sage Aréus, supposez-vous qu’à lui seul il puisse soutenir un pareil poids ? L’Orient et l’Occident, tellement hétérogènes dans leur civilisation, seraient difficilement gouvernables par une volonté unique ; il y a part à deux pour le moins dans cette proie sur laquelle votre avide pupille a jeté déjà son dévolu. »

Elle avait dit cela, moitié railleuse, moitié arrogante, et les notes sonores de sa voix remplissaient la vaste salle comme les arpèges d’une harpe touchée par une main habile.

Aréus la contemplait ; de son œil exercé il pesait la densité passionnelle de cette âme et se demandait si l’ambition y serait assez forte pour triompher définitivement de l’amour. Le résultat de ce rapide examen fut sans doute conforme à son désir, car il reprit avec une assurance parfaite :

« L’empire du monde, Grande Reine, ne saurait plus être partagé. Vous savez qu’à l’heure actuelle la plupart des peuples autochtones ont accepté depuis longtemps déjà la tutelle de la métropole du Latium. Les autres nations, res-