Page:Bertheroy - Cleopatre.pdf/109

Cette page a été validée par deux contributeurs.
98
CLÉOPÂTRE

saient entendre et par les carcasses entr’ouvertes des navires des flammes sortaient, qui couraient longtemps sur l’eau avant de s’éteindre. Les mâtures, embrasées de la base au sommet, formaient d’énormes faisceaux de lumière, et les voiles roulées encore autour des vergues s’en détachaient par places sous l’action du feu ; des lambeaux incandescents étaient emportés au loin par le souffle impétueux du Khamsin.

Mais le fléau s’acharnait surtout aux flancs métalliques des navires qui résistaient encore à l’embrasement général. Des langues de feu léchaient les rebords cuivrés ; elles paraissaient et disparaissaient comme des feux follets, repoussées d’abord par la rigidité froide du métal, jusqu’à ce que, s’amollissant sous cette caresse, il se fût fondu en un brasier liquide de forge, où elles s’enfonçaient victorieusement.

Au premier coup d’œil, Kaïn avait mesuré toute l’immensité du désastre ; il avait compris avec sa sûreté de vue habituelle que tenter d’arrêter l’incendie des vaisseaux à l’ancre serait impossible et que tout son effort devait