Page:Berthelot - Les mystères de Montréal, 1898.djvu/99

Cette page a été validée par deux contributeurs.
98

elle vit Bénoni qui était en train de crêper la chevelure à sa bien-aimée et de tout démolir dans l’appartement.


XX

CONCLUSION.


Bénoni après l’attentat sur Ursule était resté à St-Jérôme où il espérait rencontrer Caraquette.

Il avait fait la connaissance avec l’homme de cour du curé et par son influence il avait obtenu de l’emploi dans les mines de fer.

Bénoni était un licheur de première force.

Son gosier était devenu un véritable Sahara.

Il buvait comme les sables de ce désert.

Lorsqu’il était cassé il recourait à des emprunts effectués au détriment de la bourse d’Ursule.

La pauvre fille avait épuisé le petit trésor de ses économies pour satisfaire aux exigences de son amant.

Pendant la visite de Caraquette Bénoni était entré dans la cuisine de la comtesse où son amoureuse était en train de faire le blanchissage de la maison.

Ursule, les cheveux en désordre était penchée sur sa cuve et s’usait les jointures sur une planche à laver. Des grosses gouttes de sueurs perlaient sur le front de la jeune fille et tombaient dans la cuve d’où s’élevait une buée fade et chaude.

Bénoni, qui était entré en titubant s’approche de la jeune fille et lui passa un bras autour de la taille.

Ursule lâcha le linge qu’elle frottait sur les cannelures de sa planche et d’un coup de coude violent elle se débarrassa de l’étreinte du pochard en disant :

— Veux-tu t’arrêter !

Bénoni d’une voix entrecoupée par des hoquets chargés des effluves de la boisson qu’il avait bue, lui répondit :

— Tiens, Ursule, il y a pas de « go-long ». Faut que tu me prêtes trente sous, je te remettrai ça dans le temps du gagne.

— Bénoni, il y a longtemps que tu m’achales pour de l’argent. Cré sans cœur ! tu viens trouver une créature pour avoir trente sous. Faut que ça finisse !

— Cré tête sèche ! Est-ce comme ça que tu traites un ami ? Tire-moi un trente sous de suite ou je te fais péter ma main sur les babines.