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— Prisonniers, dit-il, ce n’est pas la première fois que vous paraissez devant la Cour.

Vous, Cléophas Plouf, vous méritez une sentence sévère. Il y a qu’un autre animal dans la ville qui se met dans le même état où vous avez été trouvé la nuit dernière, ça c’est un cochon. Pendant que vous étiez ivre vous avez troublé la paix en vous battant avec votre ami. Je vous condamne à $5 ou un mois. Emmenez-les.

Les deux prisonniers furent reconduits dans la chambre d’attente.

La sentence qui venait de les frapper avait opéré un rapprochement entre les deux ennemis.

Ils causèrent ensemble du résultat de leur procès. Bénoni prit la parole le premier.

Le vieux a été dur pour nous autres. Il me semble qu’il aurait pu nous donner $1 ou huit jours.

— C’est ce maudit constable qui a juré trop fort. Si jamais je mets la main sur Bellebôbine, je lui casse le troufignon.

— On descend tout de même chez Payette. On n’a pas c’te tôle.

— Fais en pas de cas.

— C’est le skelly que je trouve pas ragoûtant. Casser de la pierre il paraît que ça force pas.

La conversation des deux condamnés fut interrompue par l’entrée du sergent Dreyfus, qui appela Cléophas Plouf.

Avancez par ici, Plouf, votre femme va payer votre amende.

Cléophas suivit l’officier qui le conduisit devant le comptoir dans le greffe du Recorder. Scholastique était là.

Elle venait de payer l’amende de son époux perfide.

Le greffier lui avait donné un reçu qui lui permettait de faire remettre son mari en liberté.

Scholastique se tourna et en voyant Cléophas :

— Tiens, c’est toi ! Eh visage d’homme sans cœur ! J’ai payé ton amende.

Que vas-tu faire à présent ? Je suppose que tu vas continuer à lôfer.

— Scholastique, répondit Cléophas touché par la générosité de sa femme. Scholastique, je vois que je me suis mal conduit. Scholastique, je t’écouterai. Je travaillerai à n’importe quoi pour faire vivre notre famille. Je te l’assure, ma grande conscience du bon Dieu !

— Je t’ai pardonné encore une fois, Cléophas. Tu vas venir rester avec ta famille. J’ai loué une maison dans la rue Campeau et je gagne déjà assez d’argent pour faire vivre nos huit enfants, je vas en journée et je lave pour plusieurs maisons de la rue Sainte-Catherine.