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— Tu as fait une bêtise, mon cher Bénoni. Il faut maintenant la réparer. Je t’avais accordé ma confiance et tu m’as trompé d’une manière indigne. Tu croyais que tu n’avais aucun témoin de ton crime lorsque tu as lâchement assassiné le pauvre Cléophas dans la cour du père Sansfaçon. Tu croyais aussi que je te voyais pas lorsque tu es venu il y a trois jours dans l’écurie prendre quelques dollars dans le coffre qui m’appartenait. Tu n’as pas été assez prudent. Tu aurais dû examiner le vieux sleigh. Tu aurais pu y voir le témoin de ton crime. Cléophas repose encore sous le tas de fumier. Je ne l’ai pas dérangé et je ne le dérangerai pas si tu consens à exécuter à la lettre tout ce que je te dirai.

— Monsieur Caraquette, fit Bénoni, êtes-vous un ange ou un démon ? Je suis en vos mains, faites de moi ce que vous voudrez, je suis votre esclave et je vous obéirai aveuglement.


XIII

LE SERMENT.


— Écoutez-moi, Bénoni, reprit l’homme au chapeau de castor gris. Voici les conditions que je vais te poser. Si tu m’obéis tu échapperas à la potence. Si non… Couic. Ici Caraquette fit le geste d’un homme qui est étranglé par la corde du bourreau.

Il invita Bénoni à prendre un siège et lorsqu’il fut assis il s’encampa dans sa chaise, mit ses deux mains dans les échancrures de sa veste et parla dans les termes suivants :

— Bénoni, tu files un mauvais coton, et tu ne devrais pas attaquer à plus fort que toi. Le trésor que tu as caché chez le père Sansfaçon ne m’appartient pas et je dois le remettre à ses propriétaires légitimes. Pour t’emparer de cet argent tu n’as pas reculé devant un meurtre.

— Un meurtre ? interrompit Bénoni, comment pouvez-vous dire cela, monsieur Caraquette ?

— J’ai toutes les preuves nécessaires pour te faire monter sur la potence. Le cadavre de Cléophas t’accuse, et l’argent que tu dépenses aujourd’hui tu l’as acquis au prix d’un lâche assassinat.

— Assez, monsieur, dites-moi où vous en voulez venir.

— Je te laisserai la jouissance paisible d’une partie raisonnable du trésor à condition que tu m’appartiennes corps et âme et que tu exécutes à la lettre les ordres que je te donnerai. Lorsque tu retourneras à Montréal, tu entreras dans l’écurie de ton beau-père et tu y prendras tout l’argent que j’ai laissé dans le coffret. Ne t’occupe pas