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Bénoni, pour se remettre de l’émotion nerveuse que lui avait causée son crime, sentit le besoin de se remonter le système avec quelque chose de chaud.

Il se rendit dans la taverne la plus proche et prit une gobe de forgeron.

En ouvrant le portefeuille de Cléophas pour payer sa consommation, il vit de nouveau la lettre à l’adresse d’Ursule.

Il déchira l’enveloppe et se mit à lire la missive qui était rédigée comme suit :

« Mon Ursule bien-aimée,

« Tu m’as fait manger de l’avoine pendant longtemps. Si tu savais dans ma pauvre mansarde combien de temps j’ai pleuré ton absence. Ah par pitié ne me fais plus souffrir ! Je me sens triste comme le petit mousse noir sur le mât d’une corvette. Que je serais heureux des baisers d’une femme, que je serais heureux si je pouvais mourir ? Si tu savais combien je t’aime, bien sûr toi-même tu m’aimerais. Dieu m’a conduit vers vous, petite fleur des bois, toujours, toujours cachée. Reviens à moi, toi que j’adore. J’ai de l’argent en masse. C’est l’amour qui dore de reflets joyeux le cœur tiède encore. Ah viens, c’est la bonne chère, ma chère, qui fait le bonheur. Je t’attends, ma bien-aimée, ce soir à neuf heures. Nous fuirons ensemble. Nous irons en Amérique jouir d’un bonheur sans mélange.

« Ton amant pour la vie,
« CLÉOPHAS. »

Après la lecture de cette lettre, Bénoni réfléchit quelques minutes.


VII

OÙ BÉNONI EST EMBARRASSÉ.


Bénoni sentit rallumer dans son cœur le feu dont il avait brûlé pour Ursule.

Depuis sa sortie de prison il n’avait jamais eu l’occasion de rencontrer la jeune fille.

Elle seule manquait aujourd’hui à son bonheur.

Mais il lui fallait trouver le trésor qui avait été caché par Cléophas.

Il se dit que le magot ne devait pas être loin de la résidence du père Sansfaçon.