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res du matin ivre comme un porte-faix, après avoir dépensé toute la recette de ses courses.

La bonne femme Sansfaçon pour faire bouillir la marmite, allait travailler en journée. Cunégonde, sa fille cadette, gagnait $2 par semaine à faire des torquettes chez McDonald.

Ursule, en sortant de prison, avait passé une couple de jours sous le toit paternel, mais l’inconduite de son père et les scènes scandaleuses dont elle était témoin la forcèrent à chercher un asile chez des amis.

Le vieux charretier fut interrogé par Bénoni au sujet du petit Pite.

Pendant l’incarcération de son père, le gamin était parti de Ste-Thérèse. Comme il était rendu au bout de son peloton et comme il abhorrait le toit paternel, le mauvais sujet traînait les rues de Montréal et gagnait sa vie à vendre des « Star », des « Patrie » et des « Courrier de Montréal ».

Le père Sansfaçon à son tour posa des questions à Bénoni.

— Dis-moi, mon fiston, qu’est-ce que tu penses du bourgeois qui a amené le petit Pite à St-Jérôme ?

— Ah ! pour ça, père, c’est bien difficile. Il y a bien du micmac là-dedans. Si le petit Pite parlait, il pourrait nous mettre sur la piste. Cléophas, la dernière fois que je l’ai vu, était bien coppé. Il dépensait de l’argent comme un Canadien revenu de Californie.

— Ce grand Jack de Cléophas est dans les secrets du monsieur qui est mort à Ste-Thérèse. Il faudra l’amener veiller avec nous et lorsqu’il sera en fête il pourra nous donner des informations.

— Dans le fond, Cléophas ne m’aime pas. Il m’a pris en grippe depuis que je lui ai fait manger de l’avoine auprès d’Ursule.

— C’est correct. J’admets que Cléophas se méfiera de toi, mais, moi, je pourrai dénicher un beau merle, si j’apprends où il est allé, certain soir, avec un coffre qui contenait son trésor.

Travaillons chacun de notre côté. Le premier qui mettra la main sur le magot le partagera avec l’autre.

Après avoir trinqué avec le vieux charretier, Bénoni sortit de la maison et alla se promener sur la rue des Commissaires avec l’espoir de rencontrer Cléophas.

Comme il logeait le diable dans sa bourse, il lui fallut gagner quelques sous dans sa journée.

Il travailla toute la matinée au déchargement d’un steamer. À midi il avait gagné une somme suffisante pour se payer un dîner et un coucher.