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forcer à lâcher une partie du gâteau qu’ils sont parvenus à saisir. Alors ils persiflent la province ou ils font le silence sur elle, quitte à se faire à Paris un tremplin avec la Bretagne, la Provence, la Lorraine et la Gascogne, qu’ils trouvaient si étroites, potinières et inhabitables tant qu’ils y ont vécu. Les Parisiens de Paris ne sont pas innocents non plus de mauvaises dispositions envers les provinciaux. Je le sais bien moi-même, maintenant que je suis considérée à Paris comme une provinciale. C’est là l’inconvénient, mon cher ami, des situations hybrides. On est rejeté par les uns et on n’est pas adopté par les autres. On blague ma ville, son ennui, ses préjugés, ses manies, son petit esprit et ses prétentions, et on s’esclaffe quand je la défends.

En feuilletant ce matin le dernier volume d’Octave Uzanne : « Le célibat et l’amour » — préface de Rémy de Gourmont, s’il vous plaît — mais n’ai-je pas déjà lu autre part ces pages de Rémy de Gourmont ? — je suis tombée sur un passage amusant. Ce livre est la glorification du célibataire, excepté, bien entendu, du célibataire provincial. Le célibataire provincial sent le rance, il est avaricieux jusqu’à la crasse, il est mal tenu, triste, affalé et même il a des vices de