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Soit en ceste douceur son esprit moderé,
S’il veut voir et son sceptre et soy-mesme asseuré :
Sans rendre ny son regne horrible de supplices,
Ny ses graces non plus la tutelle des vices :
Et faire devenir, en se trop relaschant,
Le temple de salut l’asyle du meschant.
Qu’il ayme et craigne Dieu : qu’il l’honore et le serve :
Qu’il sache que luy seul l’establit et conserve :
Qu’un roy n’est reveré que pour estre son oint,
Et qu’on le garde en vain s’il ne le garde point.
Qu’il croye, et qu’il adore, et suive sa parolle :
Qu’en la mer de ce monde il l’ait pour sa boussole :
Qu’il mesure à ce pied la puissance des roys :
Et que la reputant pour la royne des loix,
Il l’ait au fond du cœur incessamment escrite,
Mais que ce soit en prince, et non pas en hermite.
On pouvoit bien jadis, vivant l’antique loy,
Demeurer tout ensemble et grand prestre et grand roy,
Car rien n’empeschoit lors qu’une puissance mesme
Ne mariast la mistre avec le diadême :
Mais icy leurs devoirs se trouvent divisez :
Les moines rois en fin deviennent mesprisez :
Et s’esgallants sous eux les serviteurs aux maistres,
Les sujects font les rois quand les rois font les prestres.
Qu’il soit prince de foy, veritable, et constant :
Que son ame ait horreur de tromper en mentant :
Et que, comme ses faicts ne seront que miracles,
Ses parolles non plus ne soient que des oracles.
Veuille le tout-puissant, sous luy rendre amortis
Tous brasiers allumez de contraire partis :
Car souvent, pour surcroist des mal-heurs qui s’y couvent,
Il se trouve deux roys ou deux partis se trouvent :
Mais encor, s’il falloit que tels maux eussent cours
Aussi bien de son temps qu’ils ont eu de nos jours,
Puisse l’heureux fanal d’un conseil salutaire
Le guider sur le pas de ce grand roy son pere,