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Mis l’idole de Baal dedans son sanctuaire,
Et tout ses saincts vaisseaux prophanez et ravis.
J’ay faict mourir mon ame, encore qu’immortelle,
Puis qu’ainsi comme on voit par la commune loy
Que c’est la mort du corps qu’estre separé d’elle,
C’est aussi son trespas que de l’estre de toy.
De l’autheur du mensonge ayant suivy l’eschole,
J’ay mon precepteur mesme en cet art surmonté :
L’orgueil m’a faict servir à moy-mesme d’idole,
Et l’envie attrister des fruits de ta bonté.
L’avarice enchantant mon cœur de son breuvage
M’a faict suivre à clos yeux la rapine sa sœur :
L’avarice a changé mes biens en mon servage,
M’en rendant possedé, plustost que possesseur.
J’ay veu souffrir le pauvre, et vers son indigence
Mon secours au besoin ne s’est point estendu :
J’ay veu la calomnie opprimer l’innocence,
Et n’ay pas d’un seul mot son bon droit defendu.
Mais en vain, ô seigneur, mes forfaits je te conte,
Tu les sçais, et leur nombre ainsi cogneu de toy,
Pensant à ta bonté me fait rougir de honte,
Pensant à ta rigueur me fait pallir d’effroy.
Aussi (las ! ) n’est-ce pas afin que tu les sçaches
Qu’en me les reprochant d’horreur je me remply :
Mais je te les découvre afin que tu les caches,
Et te les ramentoy pour t’en causer l’oubly.
Heur que j’espererois, si mes fautes nouvelles
Te laissoient effacer les vieilles de ton cœur :
Mais comment (mes erreurs se rendant eternelles)
N’en seroit pas tousjours la memoire en vigueur ?
Mon ame dés l’enfance aux pechez asservie,
T’irrite si souvent de l’œuvre et du penser,
Et tant d’iniquitez accompagnent ma vie,
Qu’on peut dire, qu’en moy vivre c’est t’offenser.
Et je