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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

attitude était celle d’un profond regret de ce qui lui était arrivé vers cinq heures du soir, sa mère et lui me conduisirent ici pour me faire panser. Revenus à l’hôtel, Verlaine et sa mère me proposèrent de rester avec eux, pour me soigner, ou de retourner à l’hôpital jusqu’à guérison complète ; la blessure me paraissant peu grave, je manifestai l’intention de me rendre le soir même en France, à Charleville, auprès de ma mère. Cette nouvelle jeta Verlaine dans le désespoir ; sa mère me remit 20 francs pour faire le voyage, et ils sortirent avec moi pour m’accompagner à la gare du Midi.

Verlaine était comme fou il mit tout en œuvre pour me retenir d’autre part, il avait constamment la main dans la poche de son habit, où était son pistolet. Arrivés à la place Rouppe, il nous devança de quelques pas, et puis il revint sur moi ; son attitude me faisait craindre qu’il ne se livrât à de nouveaux excès ; je me retournai et je pris la fuite en courant ; c’est alors que je priai un agent de police de l’arrêter.

La balle, dont j’ai été atteint à la main, n’est pas encore extraite ; le docteur d’ici m’a dit qu’elle ne pourrait l’être que dans deux ou trois jours.

D. – De quoi viviez-vous à Londres ?

R. – Principalement de l’argent que Mme Verlaine envoyait à son fils nous avions aussi des leçons de français que nous donnions ensemble, mais ces leçons ne nous rapportaient pas grand’chose, une douzaine de francs par semaine, vers la fin.

D. – Connaissez-vous le motif des dissentiments de Verlaine et de sa femme ?

R. – Verlaine ne voulait pas que sa femme continuât d’habiter chez son père.