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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

qu’il n’y avait rien à faire pour nous dans cette ville, nous sommes allés à Londres. Nous y avons vécu ensemble jusque dans ces derniers temps, occupant le même logement et mettant tout en commun. À la suite d’une discussion que nous avons eue au commencement de la semaine dernière, discussion née des reproches que je lui faisais sur son indolence et sa manière d’agir à l’égard des personnes de nos connaissances, Verlaine me quitta presque à l’improviste, sans même me faire connaître le lieu où il se rendait ; je supposai cependant qu’il se rendait à Bruxelles, ou qu’il y passerait, car il avait pris le bateau d’Anvers ; je reçus ensuite de lui une lettre datée « en mer », que je vous remettrai, dans laquelle il m’annonçait qu’il allait rappeler sa femme auprès de lui, et que, si elle ne répondait pas à son appel, dans trois jours il se tuerait ; il me disait aussi de lui écrire poste restante à Bruxelles ; je lui écrivis ensuite deux lettres, dans lesquelles je lui demandai de revenir à Londres ou de consentir à ce que j’allasse le rejoindre à Bruxelles ; je désirais nous réunir de nouveau, parce que nous n’avions aucun motif de nous séparer.

Je quittai donc Londres, j’arrivai à Bruxelles mardi matin, et je rejoignis Verlaine ; sa mère était avec lui il n’avait aucun projet déterminé ; il ne voulait pas rester à Bruxelles, parce qu’il craignait qu’il n’y eût rien à faire dans cette ville ; moi, de mon côté, je ne voulais pas consentir à retourner à Londres, comme il me le proposait, parce que notre départ devait avoir produit un trop fâcheux effet dans l’esprit de nos amis, et je résolus de retourner à Paris ; tantôt Verlaine manifestait l’intention de m’y accompagner, pour aller, comme il disait, faire justice de sa femme et de