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JEAN-ARTHUR RIMBAUD

Durant le très court laps de temps qui avait séparé la date de la première lettre de Rimbaud de la date de son arrivée dans la capitale, l’auteur des Poèmes saturniens avait à ses amis du « Parnasse contemporain » parlé de la prodigieuse recrue qu’on allait faire il leur avait communiqué les poèmes si savoureux et si spéciaux du provincial, ainsi que ses missives décelant une âme aussi grande que singulière. On attendait avec curiosité la venue du pénétrant rimeur des Assis. Charles Cros en particulier, Charles Cros, l’inventeur avant tout le monde du téléphone, du phonographe et de la photographie des couleurs, et qui fut en même temps un délicat poète dont l’œuvre, le Coffret de Santal, a été par un palikare de goût[1] quelque peu pillée, Charles Cros avait admiré. Il voulut aller avec Verlaine saluer Rimbaud à la descente du train. Mais, soit malentendu, soit station prolongée en un café, ils arrivèrent trop tard à la gare. Ce ne fut que rue Nicolet, chez Verlaine, où le voyageur, au débarqué, s’était aussitôt rendu, qu’ils purent lui souhaiter la bienvenue. Accueilli par Madame Verlaine et la mère de celle-ci, Madame Mauté,

  1. Jean Moréas. Quel poète n’a-t-il pas imité ? Charmant hommeau demeurant, que son amour de la langue et de la poésie françaises fit le héraut du Symbolisme. Rimbaud a été mis par lui très gentiment à contribution pour les Cantilènes et le Pèlerin passionné.